C’est après 1640 que le domaine de Vaudry-Fontaine entre réellement dans l’histoire de Saint-Laurent-Blangy. En effet, c’est au cours de la guerre de 30 ans et plus précisément en 1640, peu avant le siège d’Arras par les troupes de l’armée française, que la 1re prévoté Saint-Michel située en zone militaire, rue des Rosati à Blangy, est rasée comme l’ensemble des faubourgs de la ville d’Arras. Lors du siège d’Arras en 1654, par les Espagnols, de nouvelles destructions ont lieu et il faut attendre la paix de Nimègue en 1678 pour voir notre région se reconstruire.
Dès lors, l’abbaye Saint-Vaast, propriétaire des lieux, fait le choix de réédifier la prévôté Saint-Michel en dehors de cette zone militaire et choisi Vaudry-Fontaine qui présente les mêmes atouts que l’ancien site.Il s’agit de la fontaine à Mouscrons entourée de viviers et de bois, l’ensemble étant situé en bordure de la rivière Scarpe. La construction de la nouvelle Prévôté, de style Louis XIII, débute en 1684 par les deux bâtiments principaux, une chapelle et le colombier qui sont terminés en 1685. Une seconde chapelle sera parachevée en 1691. Un petit bâtiment renfermait l’infirmerie et la chapelle domestique à l’usage des religieux malades et du Prévôt.
C’est en 1692 que le religieux dom Hadulphe de Lôs fait procéder à l’aménagement de la fontaine aux Mouscrons qui est classée parmi les six grandes fontaines de l’Artois. Elle porte déjà au XIVe siècle cette dénomination. La pièce d’eau située en avant de la fontaine présente la remarquable particularité de posséder des très jolis fonds aux reflets bleu vert. Ses eaux se déversent dans la Scarpe par un canal se terminant en déversoir.
Jusqu’à la Révolution, la Prévôté subira de nombreuses modifications mais gardera sa fonction première.
Vendu comme bien national le 11 avril 1791, elle devient la propriété d’Étienne Casimir Verdevoy, juge de paix du canton de Roeux pour la somme de 51300 livres.
C’est à cette époque que surviennent de grands changements en démolitions, réorganisations et réaménagements du domaine. On parle maintenant du château Saint-Michel et non plus de la prévôté Saint-Michel.
Après le décés de Verdevoy survenu le 10 janvier 1841, sa veuve entreprend, en 1842, de vendre une parti du domaine à Xavier Crespel-Pinta ancien fabricant de sucre.
A cette date, il existe deux châteaux sur la propriété. Celui de Saint-Michel et le Vaudriet, petite demeure qui s’apparente davantage à un manoir qu’à un château. Il se situe entre la fontaine à Mouscrons et l’actuelle rue de Tilloy-les-Mofflaines.
C’est en 1874, que Mme de Bonnival fait construire une troisième demeure sur la partie nord du domaine entre la Scarpe et la fontaine à Mouscrons. Ce château, constitué de pierres et de briques, reprend le style Louis XIII.
A cette époque, Blangy entre dans l’ère industrielle et ses parcs blottis le long de la Scarpe, vont être un des atouts pour attirer de nombreux entrepreneurs.
Mais arrive la Première Guerre mondiale qui va en quelques semaines ruiner totalement le domaine ; fin octobre 1914, les trois châteaux, situés en première ligne allemande, sont anéantis, la fontaine, qui alimente les troupes germaniques, subie de nombreux bombardements qui vont réduire à néant la belle maçonnerie en pierres calcaires, les arbres du parc sont pour la plupart foudroyés et le mur de cloture au sud, le long de la route de Feuchy, ne résiste pas au trois années de combats. Mais l’événement le plus épouvantable pour les civils du domaine se déroule le 7 novembre 1914. En effet, à cette date les allemands avaient regroupés dans les caves du château Saint-Michel Mme de Bonnival, Mlle Le Gentil et le régisseur du domaine M. Mayet. Alors que ces personnes s’étaient réfugiées au sous-sol, derrière l’abri de la terrasse, un obus français transperça la voûte et explosa dans la cave, tuant Mlle Le Gentil et M. Mayet et blessant grièvement Mme de Bonnival qui décédera 15 jours après à Feuchy. Mlle de Bonnival, appelée par un officier allemand dans une autre partie du sous-sol, échappa au massacre.
Ce tragique événement a son importance car il est à l’origine de l’édification de la chapelle Saint-Michel. C’est justement en hommage à ces personnes que Mlle de Bonnival, maintenant seule propriétaire du domaine, fit batir, en 1927, ce sanctuaire.
Elle fit également reconstruire le château de Vaudry-Fontaine (médiathèque actuelle) mais, faute de moyens financiers, il n’était plus question de rebâtir le Château Saint-Michel et le Vaudriet.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Vaudry-Fontaine servira tour à tour de dépôt de véhicules blindés aux Britanniques et ce jusqu’en avril 1940, puis aux Allemands jusqu’au 1er septembre 1944, date de la libération de Saint-Laurent-Blangy.
Après la signature de l’armistice le 8 mai 1945, la levée de la réquisition d’octobre 1945 permet à Gaston Richebé, nouveau propriétaire du domaine (Mlle de Bonnival est décédée subitement le 26 mars 1940), de remettre en état Vaudry-Fontaine et en particulier la fontaine monumentale qui sera achevée en 1956. Il s’attache aussi à réorganiser les jardins, les plantations et les alignements d’arbres.
En 1963, le domaine est classé « Site pittoresque ». Claude Richebé, le fils de Gaston Richebé, hérite du domaine à la mort de son père survenue le 25 juin 1963 à Paris. En 1999, Claude Richebé se resout à vendre la propriété qui est acquis conjointement par le Conseil Général du pas-de-Calais et la Commune de Saint-laurent-Blangy. La médiathèque Jean-Paul Fleurquin est inaugurée le 20 octobre 2001.
Jean-Luc Letho Duclos